Auteurs : Valérie Gagelin – PTSTA Education, Dominique Basarte – CTA Education

 

Le choix du métier d’enseignant s’enracine dans le désir de participer activement à l’émergence d’un monde meilleur, à l’avènement d’une cité humaniste, par la transmission des valeurs, des connaissances et de l’enthousiasme pour la vie.

On entre dans ce métier, façonné par notre propre histoire, nos modèles, nos espoirs de rencontres, et nos croyances. Aussi, connaître son propre cadre de référence d’enseignant permet-il de comprendre les seuils d’entente, implicites avec certains élèves avec lesquels il nous est facile d’enseigner; et les seuils de discord, de divergence, avec d’autres, si différents, qui ne tardent pas à se manifester.

Partant de là, l’explicitation du contrat de classe, en début d’année, pour créer l’alliance éducative, représente une étape préventive indispensable à faire s’exprimer, par la voix des élèves, les cadres de référence multiples, et d’engager une dynamique positive dans le groupe, où chacun situe sa place et ses responsabilités. L’expérience montre, par exemple, à quel point le mot “respect” laisse les élèves perplexes, ou focalisés sur le devoir de politesse envers l’adulte; et combien il importe d’en élargir la portée à la considération positive inconditionnelle de soi, des autres, et du monde en général. En élaborant un contrat qui structure, donne du sens à l’activité (la Protection), responsabilise et invite chacun à prendre sa place (la Permission), l’enseignant encourage l’autonomisation chez les élèves : la Puissance du groupe s’exprime, à travers l’engagement mutuel dans l’activité  et l’authenticité dans la relation.

Bien entendu, ce contrat –  quelque peu léonin – n’est pas un blanc seing propre à brider les comportements manifestant de la résistance, quelle qu’en soit la forme de passivité. Il est même heureux que cette passivité s’invite et vienne questionner l’enseignant dans sa pratique.

Dans les situations où le groupe s’empêtre dans des jeux psychologiques, il est nécessaire que l’enseignant s’engage à clarifier le processus : en interne, pour éviter de céder à des méconnaissances ; et avec le groupe, en reprenant les clauses du contrat, par exemple, en agissant sur la structure : il remet du sens, renégocie les permissions, donne des signes de reconnaissance pour chaque état du moi. Il peut aussi utiliser la confrontation, à partir de l’Adulte ou de l’Enfant, en cas de manquement au contrat ; ou tout simplement proposer une activité plus stimulante ! Afin de réengager un cercle vertueux.

Les élèves qui posent difficulté mobilisent en particulier notre réflexivité et notre créativité : quels sont leurs besoins ? Comment je m’autorise à les entendre, à les satisfaire, tout en tenant compte du cadre institutionnel, du programme ? Quelles remédiations j’invente pour les accompagner ?

Bien souvent, derrière une difficulté d’apprentissage s’en cache une autre, d’un autre ordre, en lien avec la construction identitaire de l’élève. Dès lors, comment accompagner le jeune pour lever ce qui le freine en amont ?

Attentif aux signaux dans le comportement qui pourraient traduire un blocage ou un frein à l’apprentissage, l’enseignant s’interroge sur les besoins non conscientisés, il aide l’élève à les verbaliser : par exemple, que signifie pour cette écolière martiniquaise qu’elle se dessine en fillette blanche et blonde ? Que signifie, pour cet autre enfant, son incapacité à tenir en place ? Ou cet autre encore, qui ne supporte pas de perdre, qui se met en colère et attire les moqueries des autres ? L’enseignant formé à l’AT dispose de leviers pour se questionner et intervenir :

  • Leviers qui visent à créer et maintenir le lien : accueillir l’émotion qui s’exprime, communiquer en branchant les états du moi positifs – évitant de céder au processus transférentiel aboutissant aux jeux psychologiques – choisir quels signes de reconnaissance, quelles permissions donner.
  • Leviers qui visent à motiver chacun dans l’activité : l’enseignant allie la qualité de la relation à celle des contenus d’apprentissage, qui doivent répondre à la diversité des besoins des élèves. Selon leur âge et l’activité, il stimulera la créativité de l’Enfant Libre, la réflexion de l’Adulte et/ou les valeurs du Parent.

Les enseignants qui connaissent l’AT tendent à mettre en acte une posture modélisante exprimant l’OKness – faite de soutien, de bienveillance, de fermeté, s’autorisant l’humour, et témoignant d’une confiance dans la réussite de chacun. Une posture optimiste, qui atteste qu’on peut aller de l’avant ensemble, chacun apprenant de l’autre. Serait-ce là une définition sommaire de l’exercice de l’autorité “juste” ?

A partir d’études de cas rencontrées au cours de prises en charge d’enfants en difficulté scolaire, au poste de rééducatrice du Réseau d’Aide Spécialisée aux Enfants en Difficulté ; et de cas vécus en collège, au poste de professeure de français, nous illustrerons et analyserons la démarche de l’enseignant et l’application des concepts de l’analyse transactionnelle.

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Comment mobiliser les dynamiques personnelles et relationnelles pour nourrir l’espoir chez l’enseignant et l’enseigné ?

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